AVALER DES POIRES D'ANGOISSE
subir des traitements cruels ; vivre des situations très désagréables ; vivre l'enfer ; vivre une situation très pénible
Origine et définition
Souvenez-vous du Moyen Âge, cette époque atroce où la télévision et Internet n'existaient pas. Et pourtant, il fallait bien trouver d'autres moyens d'occuper ses loisirs, non ?
Alors une des occupations préférées de quelques-uns était de torturer ceux de leurs congénères qui avaient une tronche qui ne leur revenait pas ou qui leur avaient cherché quelques noises. Quel plaisir, en effet, d'arracher des ongles, briser quelques membres à coups de barre de fer, énucléer l'oeil droit, introduire un fer rouge dans l'anus ou bien couler du plomb fondu dans un abdomen ouvert, par exemple.
Malheureusement un gros défaut de ces amusements était le bruit, car ceux qui, dans ces activités ludiques, avaient le rôle passif, un peu à leur corps défendant, avaient la fâcheuse habitude de hurler de douleur, ce qu'on ne pouvait évidemment pas leur reprocher, en plus ; il aurait fallu en effet être un tantinet sauvage pour les menacer de quoi que ce soit s'ils continuaient à crier, hein ?
Alors pour ne plus les entendre, un bon moyen consistait à leur enfoncer dans la bouche un instrument qui, selon Larousse, "s'ouvrait au moyen d'un ressort, se développait en forme de poire, et étouffait complètement les cris". Autant dire que celui qui avait cette chose dans la bouche et qui devait subir les petites gâteries de ses camarades de jeu, devait ressentir une certaine angoisse, incapable qu'il était d'extérioriser ce qu'il ressentait.
Cela dit, ces instruments, dont le nom est cité au XVe siècle, servaient aussi plus simplement à bâillonner un prisonnier pour l'empêcher de parler.
Si, de nos jours, le genre d'amusement lié aux poires d'angoisse originelles est tombé en désuétude dans les pays dits civilisés, on peut toujours dire de celui qui vit des situations extrêmement désagréables qu'il avale des poires d'angoisse.
Par plaisanterie, certains faisaient aussi le rapprochement avec les poires du village d'Angoisse, en Dordogne, qui étaient, paraît-il, très âpres et dures à mâcher. Mais elle n'avaient probablement pas le potentiel de déplaisir des véritables poires d'angoisse.
Exemples
« Je vous présente des poires de bon-chrétien pour des poires d'angoisse que vos cruautés me font avaler tous les jours. »
Molière - La comtesse d'Escarbagnas - 1671